ETHANOL E85 versus SP95, Moteur essence à combustion interne, AVERTISSEMENTS et rappels FONDAMENTAUX (Physicochimiques, Thermodynamiques), Avantages et Inconvénients, Conséquences matérielles potentielles :

Résumé de cet article : Différences entre l’éthanol E85 versus Sans Plomb 95/98 :

L’éthanol ou E85 est un biocarburant (alcool) plus oxygéné et corrosif préjudiciable pour certains matériaux internes au moteur à combustion interne. Il est moins énergétique (pouvoir calorifique massique inférieur) mais possède un haut indice d’octane (résiste à la détonation/cliquetis) et est dédié pour les moteurs à fort taux de compression. Il est plus détergent réduisant d’autant le pouvoir lubrifiant interne lors des démarrages à froid (condensation et dilution altérant l’huile moteur), avec une consommation volumétrique de carburant plus élevée de l’ordre de+20 à +30% (densité énergétique inférieure) nécessitant souvent de reparamétrer le calculateur de gestion moteur (ECU) ou l’adjonction d’un boitier leurre.

L’essence SP95/98 est plus énergétique mais moins résistante à l’auto-allumage (cliquetis destructeurs). Elle a une densité énergétique plus élevée (à volume égal) et libère donc plus d’énergie (température et travail pour un meilleur rendement). Elle est composée d’un mélange d’hydrocarbures sans oxygène, contrairement à l’éthanol qui pour ce dernier a une combustion plus complète mais moins énergétique (rendement inférieur).

Conseils : Si un moteur thermique à combustion interne consomme notablement (significativement) de l’huile et/ou présente un kilométrage avancé, une remise en état (à neuf) de ses organes internes est vivement conseillé, voire s’impose (risque de point chaud, fusion), avant un passage au bioéthanol E85. Réduisez de surcroit l’espace des vidanges de moitié préconisé par le constructeur, avec remplacements systématiques des filtres à carburant et à huile), même pour les constructeurs qui n’homologuent ou ne valident pas un changement de carburant de ce type.

Pour plus de précisions / détails, prenez connaissance de l’article ci-dessous :

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Risque important d’entropie ou de désordre mécanique interne moteur :

Cas fréquents : Le « point chaud » anormal, dans un moteur thermique à essence à combustion interne, se réfère à une zone locale de température excessive, souvent causée par une combustion instable, ou une surchauffe du moteur, ou une défaillance du système de refroidissement, ou un déséquilibre du rapport stœchiométrique, hors contrôle par l’ECU (calculateur de gestion moteur) et ses asservissements (sondes lambda), pouvant entraîner des dommages structurels irréversibles, comme la fusion d’un ou plusieurs pistons et/ou soupapes.

Ce phénomène/désordre peut survenir lorsque la température dans une chambre de combustion dépasse les limites que les matériaux utilisés peuvent supporter, notamment lors d’un auto-allumage du carburant (détonation) ou d’une combustion anormale, ce qui peut provoquer une augmentation rapide et localisée de la température pouvant s’élever entre 1500°C et 2000°C.

Lorsque cette surchauffe locale est suffisante, elle entraîne la fusion d’un piston (ou parfois de soupapes) constitué d’un alliage d’aluminium conçu pour résister à des températures élevées mais pas à des excès thermiques prolongés anormaux de la sorte.

L’effet thermodynamique entropique associé à un tel point chaud anormal relève est lié à une déviation significative du cycle idéal d’Otto, qui normalement suppose des processus réversibles comme la compression et la détente isentropiques, ainsi qu’une combustion à volume constant.

En réalité, la présence d’un point chaud anormal indique une combustion déséquilibrée et non contrôlée, souvent liée à des conditions de fonctionnement extrêmes et ou anormales, comme un taux de compression trop élevé ou une avance à l’allumage excessive ou un mélange stœchiométrique déséquilibré (par insuffisance de régulation ou d’asservissement des sondes Lambda), ce qui peut provoquer une combustion rapide et instable.

Un ratio anormal de combustion, (amplitudes lambda limité qui est en temps normal de 25 à 30 % pour un moteur à essence),augmente la pression et la température de manière exponentielle, déclenchant un point chaud fatal, dépassant les limites thermiques admissibles du système, surtout lors des régimes élevés du moteur, déséquilibrant ainsi l’efficacité des échanges thermiques du moteur,..

En outre, une partie importante de l’énergie (environ 70 à 75 %) est perdue sous forme de chaleur non convertie en travail utile, et dans le cas d’un point chaud anormal, cette chaleur est concentrée de manière déséquilibrée en un point excessivement chaud dans une zone précise, avec l’augmentation de façon exponentielle le risque de défaillance mécanique localisé.

La fusion d’un piston, et pas les autres, résulte d’une accumulation localisée de chaleur qui dépasse la température de fusion des matériaux utilisés, comme l’aluminium ou des alliages dérivés spécifiques, est souvent le résultat d’une combinaison de facteurs thermodynamiques et mécaniques inertiels (comme un régime moteur élevé associé à un déséquilibre stœchiométrique), notamment : par une mauvaise dissipation de chaleur associée liée à une surcharge du moteur, ou une défaillance du système de refroidissement.

Ce phénomène entropique (désordre physicochimique) compromet profondément le cycle thermodynamique d’OTTO et le cycle de CARNOT, en altérant fortement les conditions thermodynamiques de fonctionnement normal des compressions et des détentes des éléments mobiles dans une ou plusieurs chambres de combustion, pouvant rendre le moteur inopérant et nécessitant le remplacement de ce dernier.

Quelques rappels théoriques et précisions physicochimiques fondamentales :

Le pouvoir calorifique du super sans plomb (SP95) est de 43MJ/kg, avec une densité de 737g/litre, tandis que l’Ethanol (Bio carburant E85) a un pouvoir calorifique de 27MJ/kg avec une densité de 780g/litre.

Autrement dit, avec un faible différentiel de densité, le E85 est moins calorifique de l’ordre de 37% face à l’essence SP.

La chaleur latente de vaporisation pour le SP95 est de 420 kJ/kg, tandis que l’E85 se situe à 845 kJ/kg, ce qui signifie que la combustion du E85 contribue à hauteur de 2,5 fois plus au refroidissement du moteur que le SP95.

Dans le cadre d’une carburation déséquilibrée, notablement en stœchiométrique, ce qui est dangereux ce n’est pas seulement une carburation trop pauvre ou trop riche, mais c’est aussi d’avoir simultanément une température de combustion anormalement élevée telle qu’elle détruit piston(s) et soupapes.

Cette situation arrive si un moteur essence, fonctionnant au SP, est pauvre en carburation, qui fait monter la pression et la température dans la chambre de combustion (P.V=n.R.T), provoquant ainsi du cliquetis ou auto-inflammation du mélange pauvre, générant des destructions par perçages de piston et/ou fusion de soupapes, surtout à hauts régimes moteur.

Pour l’E85, c’est le contraire, à grands traits, les conditions thermodynamiques sont inversées.

Autrement dit, les valeurs moyennes des rapports stœchiométriques respectifs (carburant/comburant en poids relatif) sont pour :

  •  le Super sans Plomb (SP) est de : 1/15 (1 gramme d’essence pour 15 gr d’air) ;
  • L’éthanol (E85) est de : 1/10. (1 gr d’E85 pour 10 gr d’air).

En d’autres termes, le fonctionnement à l’éthanol ou E85 nécessite d’augmenter significativement, de l’ordre de 30 à 40% en poids de carburant E85 injecté, par rapport à l’essence sans plomb (en référence aux pouvoirs calorifiques respectifs très différents), qui nécessite un recalibrage ou correction des quantités ou ratio stœchiométrique d’injection pour l’E85 par rapport aux données initiales constructeur programmées pour le SP, dans l’ECU.

Dans le cas de l’E85, il y a 3 effets thermodynamiques importants, pouvant être considérés comme positifs :

  • moindre chaleur de combustion en MJ/kg en rapport de masse ; (mégajoules/kilogrammes)
  • un refroidissement très supérieur lié à la chaleur latente de vaporisation en kJ/kg, 2,5 fois supérieure à l’essence sans plomb ; (en kilojoules/kilogrammes)
  • un taux d’indice d’octane plus élevé pour l’E85 par rapport au SP, qui retarde d’autant plus la potentielle survenance de cliquetis (autoallumage destructeur à haut régime).

Remarque : un mélange pauvre en E85 génèrera un inconfort de conduite certain lié à de nombreux à-coups en fonctionnement, et si plus pauvre que le rapport stœchiométrique nécessaire cela ne devrait pas conduire à des dégâts mécaniques internes au moteur (sauf pour les catalyseurs qui ne peuvent plus se régénérer automatiquement du fait d’une température des gaz d’échappement EGT qui sera insuffisante), et l’air entrant en excès abaisse significativement la température de combustion avec un refroidissement simultané des gaz d’échappement.

C’est bien pour cela qu’il est très souvent nécessaire, lors d’un passage à l’E85, de prévoir une reprogrammation du calculateur (ECU) de gestion d’injection du carburant dans le moteur (avec asservissements Lambda), ou l’ajout d’un boitier leurre de type « FlexFuel », quand ce n’est pas prévu d’origine par le constructeur.

Enfin, dans le cas contraire, c’est-à-dire avec un mélange (stœchiométrique) trop riche pour l’E85, des problèmes mécaniques internes au moteur peuvent apparaître surtout sur des régimes moteur élevés et lorsqu’ils sont maintenus pendant une longue période ou durée.

En effet, dans ces conditions de fonctionnement trop riche à haut régime prolongé, la température de combustion est maximale et peut dépasser la température acceptable par les organes internes au moteur.

Les risques de survenance de cliquetis pour le E85 sont réduits du fait d’un indice d’octane plus élevé que pour le SP, qui ne prévient donc pas de l’élévation anormale de la température des gaz d’échappement dans la chambre de combustion d’un ou plusieurs cylindres.

Associé à un régime moteur soutenu (supérieur à 3500 tr/min) pendant une durée soutenue, des dommages irrémédiables sont souvent causés aux pistons et / ou aux soupapes d’un cylindre, surtout si l’enrichissement en E85 atteint et dépasse les 50%.

Cas fréquemment observés :

Ce phénomène entropique, par point chaud localisé dans une chambre de combustion, peut aussi être causé par une consommation excessive d’huile moteur, enrichissant anormalement le rapport stœchiométrique de l’E85, jusqu’à la fusion d’un piston et ou de soupapes surtout à régime moteur élevé et maintenu (autoroute).

De nombreux constructeurs automobiles sont concernés et le constatent de façon récurrente dans leurs réseaux SAV depuis de très nombreuses années… et qui le déconseillent …

En conséquence, pour un moteur à essence, avant tout passage du SP à l’éthanol E85, il est nécessaire et indispensable de s’assurer de l’absence d’une consommation anormale d’huile moteur (segmentation/chemise), surtout pour des véhicules âgés avec un kilométrage important.

Il faut savoir aussi que l’éthanol E85 possède un pouvoir détergent bien supérieur au super sans plomb, nécessitant alors des fréquences de vidanges d’huile moteur bien plus rapprochées que les préconisations du constructeur pour le SP…

Rappel, lors des démarrages moteur à froid, le carburant se condense sur les parois des chemises pour descendre (dans les phases de compressions via la segmentation des pistons) dans le carter inférieur moteur, diluant et altérant d’autant les caractéristiques intrinsèques de la lubrification interne au moteur, avec accélération de l’usure interne et consommations anormales d’huile.

D’où, la nécessité avec l’E85 de réduire significativement les intervalles de vidange (de moitié environ) avec remplacements systématiques : du filtre à huile et du filtre à carburant …

Enfin, sur des moteurs âgés et/ou présentant un important kilométrage, il est fortement déconseillé de modifier les paramètres techniques d’origine constructeur (comme la puissance moteur revue à la hausse), tels que les « stages xx » sous l’E85, modifiant significativement la puissance et la charge au moteur, en raison des entropies physicochimiques et structurelles ci-dessus développées, qui ne feront qu’accélérer la survenance d’une avarie interne moteur, surtout à régime élevé et soutenu…

Article rédigé par Philippe AUDRAS.

Vice Caché sur véhicule ancien ou d’occasion, la nécessité d’effectuer une ou plusieurs expertises précises contradictoires, procédure abusive définition et sanctions

Les vices cachés sur un véhicule ancien ou d’occasion : la nécessité d’une ou plusieurs expertises précises (contradictoire). | Emmanuel ABI KHALIL – Avocat

Rappel du Droit civil :
La notion de vice caché est définie par l’article 1641 du code civil :
« Le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l’usage auquel on la destine, ou qui diminuent tellement cet usage que l’acheteur ne l’aurait pas acquise, ou n’en aurait donné qu’un moindre prix, s’il les avait connus ».


On dégage habituellement 3 critères pour caractériser un vice caché :

  • Le défaut doit être un défaut caché, c’est-à-dire non apparent lors de l’achat,
  • Le défaut doit rendre le bien inutilisable ou diminuer très fortement son usage,
  • Le défaut doit exister au moment de l’achat.

Pourtant, sur un véhicule ancien, un défaut peut être invisible à l’achat, rendre le véhicule inutilisable, et avoir pour origine un phénomène existant déjà au moment de la vente, sans pour autant constituer un vice caché.
En effet, une distinction moins souvent rappelée mais pourtant déterminante trouve à
s’appliquer particulièrement aux véhicules anciens ou d’occasion :
La jurisprudence a toujours distingué le vice caché, du défaut relevant de l’usure normale.


En pratique, il en découle deux choses : d’une part la qualification de vice caché est réservée aux défauts dus à une conséquence autre que la seule vétusté, et d’autre part le juge saisi d’un tel cas doit être suffisamment éclairé sur l’origine du défaut pour pouvoir se prononcer.
De nombreuses jurisprudences illustrent ces principes :
Cour d’appel, Nouméa, Chambre civile, 30 Avril 2015 – n° 13/00366 :
« Attendu que si la garantie contre les vices cachés s’applique aux choses neuves ou d’occasion, la jurisprudence rappelle régulièrement que le principe de la prévisibilité de certains défauts, même d’une certaine gravité, est l’une des caractéristiques essentielles des véhicules d’occasion.

Attendu qu’ainsi, pour les biens d’occasion, l’acheteur ne peut s’attendre à en retirer le
même usage ou à profiter des mêmes qualités que si le bien avait été neuf
, car des défauts peuvent apparaître, alors qu’ils ne sont dus qu’à l’usure ou à la vétusté »


Cour d’appel, Poitiers, 1ère chambre civile, 29 Mai 2018 – n° 16/03501 :
« La notion de vice caché suppose un défaut de fabrication ou de conception inhérent à la chose vendue ou à l’un de ses éléments d’équipement.
L’usure normale d’une pièce à la durée de vie limitée n’est pas constitutive d’un vice caché.
»


Cour d’appel, Rennes, 2e chambre, 17 Mars 2017 – n° 14/01561 :
« il n’est pas démontré que le remplacement de ces accessoires ne résulte pas de l’usure normale d’un véhicule d’occasion âgé au moment de la vente de 9 ans et ne constitue pas des frais auxquels l’acquéreur peut s’attendre en raison de l’ancienneté du véhicule. »


Ainsi, une panne provenant de l’une des très nombreuses pièces qui nécessitent d’être remplacées à plus ou moins long terme (entretien, maintenance, pour ne pas dire obsolescence programmée …) ne permettra pas forcément d’agir pour vice caché contre le vendeur, quand bien même le problème aurait été invisible, grave et aurait trouvé son origine antérieurement à la vente.
Amortisseurs, embrayage, filtres, disques de frein, démarreur, alternateur, batterie… autant d’éléments pour lesquels il ne suffira pas de démontrer les trois critères habituellement rappelés.


L’acquéreur devra nécessairement prouver que la panne est due à un défaut imprévisible de fabrication, de conception, d’utilisation ou d’entretien antérieur à la vente, et non à la seule vétusté.
Il sera sinon considéré que les réparations sont des frais auxquels l’acquéreur pouvait normalement s’attendre en raison de l’ancienneté du véhicule.
Pour se faire, il est indispensable que l’expertise contradictoire, amiable ou judiciaire, fasse état de l’origine du défaut ou de la cause de la panne de façon précise et ne se contente pas de la constater.
Dans le cas contraire, le juge n’hésitera pas à rejeter la demande de garantie puisqu’il ne pourra pas se prononcer sur la question de savoir si le défaut résulte d’une usure normale et prévisible ou d’un dysfonctionnement anormal constituant alors un vice caché.


A titre d’exemple, la Cour d’appel de Rennes a jugé dans un tel cas que :
« Force est ainsi de constater que l’expertise n’explique nullement en quoi la préconisation de remplacement de l’embrayage ne relève pas de l’usure normale du véhicule. […] »

S’agissant du filtre à particule, si l’expert a constaté sa surcharge et la nécessité de procéder à son remplacement, il n’explique nullement en quoi cette nécessité présenterait un caractère anormal au regard de l’âge et du kilométrage du véhicule.
« Il n’est ainsi pas démontré que les travaux préconisés par l’expert ne constituent pas des
frais auxquels l’acquéreur peut normalement s’attendre en raison de l’ancienneté du
véhicule.
» Cour d’appel, Rennes, 2ème chambre, 15 Mars 2019 – n° 15/08303


Afin de mobiliser la garantie pour vice caché, il est donc indispensable pour l’acquéreur
de prouver par un rapport d’expertise précis que le défaut ne résulte pas de l’usure
normale.

Procédure abusive : Définition et sanctions :

Par Kahina KHADRAOUI, Publié le : 28/05/2024

Agir en justice est un droit (art. 30 du Code de procédure civile) ouvert à toute personne qui est sujette à un litige. Néanmoins, le demandeur qui abuse de son droit d’agir en justice peut être sanctionné par une amende civile de 10 000 euros (art. 32-1 du Code de procédure civile) et des dommages et intérêts sur le fondement de l’article 1240 du Code civil.


Qu’est-ce qu’une procédure abusive ?
La procédure devient abusive lorsque celui qui introduit la demande abuse de sa liberté d’agir en justice pour régler un litige.
Le principe de la liberté du droit d’agir en justice
Toute personne a le droit d’être entendue sur le fond d’une prétention (art. 30 du CPC).
C’est le droit d’agir en justice qui est en principe libre.
Cela signifie que personne ne peut être forcé à agir ni empêché de le faire et personne ne peut être sanctionné pour l’avoir fait. En revanche, il y a des conditions de recevabilité de l’action en justice (v. art. 31 du CPC) destinées à encadrer les actions afin d’éviter des démarches abusives ou dilatoires qui ne seraient pas légitimes.

Le droit d’agir en justice est une liberté fondamentale fondée sur l’article 6 § 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales (v. en ce sens Cass. com., 21 juin 2023, n° 21-21.875).


La définition d’une procédure abusive :
Une procédure abusive fait référence à l’abus du droit d’agir par son titulaire. Il peut s’agir d’un recours abusif ou dilatoire. Il n’y a pas de définition exacte, mais il est acquis qu’elle résulte d’un comportement fautif et d’un manque de diligences de son auteur.


Qu’est-ce qu’un recours abusif ou dilatoire ?
Un recours peut être abusif lorsque l’une des parties est de mauvaise foi et ne cherche qu’à nuire à son adversaire, bien que ces critères ne soient pas à démontrer, un simple comportement fautif suffit. Il est qualifié de dilatoire lorsqu’il a pour seul objectif de faire durer la procédure sans que cela ne soit nécessaire. Autrement dit, il vise à faire retarder l’issue du procès.


Quand est-ce qu’un recours devient abusif ?

Un recours devient abusif lorsqu’il vise à nuire à l’adversaire*. L’abus peut provenir tant du défendeur (celui contre qui a été introduite la demande initiale) que du demandeur (celui qui introduit la demande). L’abus peut également être constitué en appel (voie de recours).
*Il n’y a pas de définition ou de critère précis. La jurisprudence évolue, et il semble
que la preuve de la mauvaise foi ou de l’intention de nuire ne soit plus exigée (v. Rapport
annuel, Cour de cassation, 2006, p. 550).
Mais, il est acquis que les juges doivent caractériser la faute commise dans le droit d’agir (Cass. civ. 2, 19 novembre 1986, n° 85-14.941 ; Cass. soc., 9 juin 2004, n° 02-46.348 ; Cass. civ. 2, 6 mars 2003, n° 01-00.507).


L’abus du recours en demande ou en défense :
L’abus du recours peut tant résulter de la demande en justice que des moyens de défense avancés par l’adversaire.
En ce sens, par exemple, une partie qui laisse se dérouler la procédure sans faire connaître sa véritable situation témoigne d’une attitude constitutive d’un abus de droit d’agir en défense (Cass. civ. 2, 16 juin 1993, n° 91-20.203).
Le seul fait d’être débouté d’une de ses demandes ne constitue pas un abus.


L’abus des voies de recours :
L’abus des voies de recours est sanctionné au même titre que l’abus du droit d’agir :
En cas d’appel dilatoire ou abusif, l’article 559 du Code de procédure civile prévoit une amende civile allant jusqu’à 10 000 euros.
Pour un pourvoi en cassation, l’article 628 du Code de procédure civile pose la même sanction.


Quelle différence entre recours abusif et résistance abusive ?
La différence entre le recours abusif et la réticence abusive se situe au niveau qui est
directement rattaché au droit d’agir en justice (v. art. 30 et s. du CPC).
La résistance abusive fait référence au comportement d’un débiteur qui refuse d’exécuter son obligation (v. art. L. 121- 3 du Code des procédures civiles d’exécution et Cass. civ. 2, 28 octobre 1999, n° 97-12.734).


Quelles conséquences en cas de procédure abusive ?
En cas de procédure abusive, et à condition que l’abus dans le recours soit prouvé par celui qui l’invoque ; la conséquence aboutit à ce que son auteur sera condamné à une amende civile pouvant aller jusqu’à 10 000 euros et peut également être astreint à des dommages et intérêts sur le fondement de l’article 1240 du Code civil (art. 32-1 du CPC).


Quelles sanctions en cas de recours abusif ?
En cas de recours abusif, en première instance*, en cour d’appel ou devant la Cour de cassation, l’auteur s’expose à une double série de sanctions :
*La première instance fait référence au premier degré de juridiction. En matière civile
vous y retrouvez notamment le Tribunal judiciaire.

  • Une amende civile ;
  • Des dommages et intérêts.
    Il ne faut pas confondre les sanctions en matière de procédure abusive avec la condamnation au titre de l’article 700 du Code de procédure civile, à régler tous les frais non compris dans les dépens. Cette dernière n’est pas une sanction, mais une conséquence de la procédure.
    L’amende civile de 10 000 euros
    L’article 32-1 du Code de procédure civile dispose qu’en cas de procédure dilatoire ou abusive, l’auteur s’expose à une amende civile pouvant atteindre 10 000 euros. La sanction est la même en cas d’abus des voies de recours (art. 559 et 628 du CPC).
    Les dommages et intérêts
    En plus de l’amende civile, l’auteur d’un recours abusif s’expose à une sanction en dommages et intérêts sur le fondement de l’article 1240 du Code civil (art. 32-1 du CPC et v. Cass. civ. 1, 25 février 1986, n° 84-14.208).
    Cette sanction suppose de rapporter la preuve d’un fait générateur fautif d’un dommage subi et d’un lien de causalité entre les deux (v. art. 1240 s. du Code civil).
  • Comment prouver un appel ou un recours abusif ?
    C’est à la partie qui invoque l’abus dans le recours ou l’appel de prouver la faute.
    S’agissant d’un fait juridique, la preuve peut être rapportée par tous moyens (art. 1358 du Code civil).

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